Lassana Doumbia ou l’art de transformer les scènes ordinaires en récits visuels intemporels

Photographier la rue, c’est s’inscrire dans le rythme d’un monde en mouvement, capter l’éphémère et en faire mémoire. Lassana Doumbia s’y consacre depuis une décennie, avec un regard à la fois doux et précis. Entre observation silencieuse et esthétique du quotidien, il explore les villes comme on lit un poème. Dans cet entretien, il nous ouvre les coulisses de sa pratique.

On pose les questions à Lassana …

Dans cette interview, Lassana  partage avec nous son parcours photographique.

SPF : Comment avez-vous découvert la photographie de rue ?
Lassana Doumbia : J’ai découvert la photo de rue en 2015, lorsque mes beaux-parents m’ont offert un appareil photo Canon EOS 100D. La photographie de rue a été une véritable révélation quand j’ai réalisé mes premières photos avec cet appareil photo que j’utilise encore.
SPF : Depuis combien de temps pratiquez-vous la photographie de rue ?
Lassana Doumbia : J’ai découvert la photographie de rue en 2015, et cela fait maintenant dix ans que je me consacre à cette discipline.
SPF : Avez-vous suivi une formation en photographie, ou êtes-vous autodidacte ?
Lassana Doumbia : En 2015, j’ai suivi une formation en photographie sur le site Apprendre la Photo, animée par Laurent Breillat. Sa pédagogie claire et sa manière de transmettre son expérience n’ont fait que renforcer ma passion pour cette discipline.
SPF : Quel matériel utilisez-vous pour la photographie de rue (appareil photo, objectifs, accessoires, etc.) ?
Lassana Doumbia : J’utilise principalement deux appareils photo : un Ricoh GR III APS-C équipé d’un objectif fixe de 18,3 mm (équivalent 28 mm au format 35 mm), ouverture f/2.8 ; et un Nikon Z5II plein format équipé d’un objectif Nikkor Z 28-75 mm f/2.8. J’utilise également de temps à autre un appareil photo argentique Canon A1 plein format équipé d’un objectif 50 mm f/1.4.
SPF : Avez-vous un équipement préféré pour la photographie de rue, et pourquoi ?
Lassana Doumbia : Mon équipement préféré pour la photo de rue est mon sac à bandoulière de la marque Peakdesign. Ce sac est extrêmement léger et très compact, idéal pour la discrétion et le confort lors des sorties photo.
SPF : Comment définiriez-vous votre style en photographie de rue ?
Lassana Doumbia : Mon style est assez varié : j’aime autant être au plus près de mes sujets pour saisir les instants du quotidien que me placer à l’écart, en attendant que la scène se compose d’elle-même autour de mon sujet.
SPF : Y a-t-il des photographes de rue qui vous inspirent ?
Lassana Doumbia : De nombreux photographes m’inspirent et influencent mon travail. Parmi ceux que j’admire particulièrement, je citerais Viviane Maier pour la dimension profondément humaniste de son regard, Daido Moriyama pour sa capacité à révéler la beauté brute du réel et du quotidien, et Harry Gruyaert pour l’exigence esthétique et la finesse de son style.
SPF : Pouvez-vous partager une de vos photos de rue préférées et raconter son histoire ?
Lassana Doumbia : Une de mes photos de rue préférées s’intitule In the Shadow of Light, publiée sur Flickr. Elle a été réalisée durant l’été 2023, au centre-ville de Strasbourg. La scène montre une famille en visite, souriante, avec au centre une petite fille entourée de ses parents. La prise de vue en contre-jour met en évidence les rayons du soleil qui illuminent particulièrement l’enfant. Cette image me tient à cœur car elle illustre l’insouciance de l’enfance, la complicité familiale et un instant de joie simple.

SPF : Quels sont les défis auxquels vous êtes confronté en pratiquant la photographie de rue ?
Lassana Doumbia : Le principal défi auquel je fais face dans la pratique de la photographie de rue est l’omniprésence des téléphones portables. Ils modifient notre rapport à l’autre, qui tend à se distendre, alors même que l’essence de cette discipline réside dans la connexion avec l’environnement et les instants de partage. Par ailleurs, la perception qu’ont certaines personnes de la photographie de rue oblige parfois à prendre des précautions afin d’éviter des situations délicates.
SPF : Pouvez-vous partager une expérience mémorable que vous avez vécue tout en faisant de la photographie de rue ?
Lassana Doumbia : À mes débuts en photographie, lors d’une sortie dans les rues du centre de Strasbourg, j’ai remarqué un homme à la barbe fournie et au style rétro parfaitement accordé. Je lui ai demandé s’il acceptait que je réalise son portrait, ce qu’il a volontiers fait, en se prêtant même au jeu. J’ai pris plusieurs clichés et nous avons longuement échangé sur la photographie. Cette rencontre m’a beaucoup appris sur la manière dont cette discipline peut être perçue et a contribué à façonner mon style ainsi que mon approche de la photographie de rue.
SPF : Comment gérez-vous les questions d’éthique liées à la photographie de rue, en particulier en ce qui concerne la vie privée des sujets ?
Lassana Doumbia : Je comprends parfaitement que certaines personnes puissent avoir le sentiment que l’on s’immisce dans leur intimité lorsqu’elles sont photographiées. J’essaie alors d’expliquer, avec pédagogie, que mon intention est simplement de capter les instants de vie et de les mettre en lumière. Je me considère comme un témoin du quotidien qui défile, animé par le désir de figer ces moments précieux, les rencontres et, surtout, les liens qui nous unissent.
SPF : Avez-vous déjà eu des situations délicates en photographie de rue et comment les avez-vous gérées ?
Lassana Doumbia : Il m’est déjà arrivé que l’on me demande fermement de ne pas prendre de photo, ou que certaines personnes se cachent le visage. En dehors de ces réactions, je n’ai pas été confronté à des situations plus délicates.
SPF : Quels conseils donneriez-vous aux débutants qui souhaitent se lancer dans la photographie de rue ?
Lassana Doumbia : Je leur dirais de se lancer, en commençant par suivre une formation de qualité pour acquérir les bases de la photographie. Ensuite, il faut pratiquer intensément, multiplier les prises de vue sous différents angles, même avec un appareil d’entrée de gamme. Les connaissances techniques permettront alors de travailler la composition, qui est l’aspect le plus essentiel de cette discipline. Cette démarche favorise les progrès et contribue à devenir un photographe accompli. Je conseillerais aussi de ne pas se limiter à un seul domaine : explorer la photo de rue, d’architecture, animalière, de paysage, sportive, etc. Peu à peu, le style personnel se précisera. Enfin, je dirais d’être curieux, d’explorer sans limite son environnement : c’est ainsi que la créativité se développe et que l’on vit des moments intenses et riches en émotions.
SPF : Avez-vous des recommandations pour développer sa créativité en photographie de rue ?
Lassana Doumbia : Il faut parfois accepter de se placer dans des situations inconfortables — qu’il s’agisse d’angles de prise de vue inhabituels ou de contraintes météorologiques. L’utilisation d’un objectif fixe constitue également un excellent moyen de stimuler sa créativité : il oblige à sortir de sa zone de confort, en incitant à se rapprocher ou à s’éloigner du sujet, selon l’intention photographique et l’angle choisi.
SPF : Avez-vous des projets ou des objectifs futurs en photographie de rue que vous aimeriez partager ?
Lassana Doumbia : L’année 2025 marque mes dix ans de pratique photographique. À cette occasion, j’envisage de publier un livre regroupant mes plus belles photos de rue réalisées au cours de cette décennie.
SPF : Prévoyez-vous de participer à des expositions ou des publications prochainement ?
Lassana Doumbia : Je n’ai pas d’objectif à court terme concernant une participation à une exposition. En revanche, c’est un projet que j’aimerais concrétiser au moins une fois dans ma vie, si l’occasion se présente.
SPF : Comment avez-vous rejoint Street Photography France ?
Lassana Doumbia : C’est ma conjointe qui m’a communiqué le lien vers un article publié par les DNA (Dernières Nouvelles d’Alsace) au sujet du Collectif Street Photography France et de son fondateur Nijat Kazimov.
SPF : Quels avantages trouvez-vous dans l’appartenance à cette communauté ?
Lassana Doumbia : J’avais le désir de rejoindre une communauté passionnée par la photographie de rue, favorisant les échanges entre photographes et proposant des contenus variés : articles techniques, réflexions sur la culture photographique, expositions, interviews, etc. Je retrouve l’ensemble de ces composantes au sein de ce collectif.
SPF : Avez-vous des projets ou des idées pour renforcer la communauté de Street Photography France ?
Lassana Doumbia : Tout mettre en œuvre pour renforcer les liens entre les membres du collectif en organisant régulièrement des sessions d’échanges entre photographes — partage d’expériences, retours constructifs sur les images — et en constituant une communauté de bénévoles chargée de promouvoir et de faire rayonner les activités de Street Photography France.

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